Ludwig25 Modérateur
Messages : 722 Points : 1004 Date d'inscription : 13/04/2020 Age : 29
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Ludwig25 Modérateur
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| Sujet: Re: [SÉRIE_ARTE] Rematch Jeu 17 Oct 2024 - 21:42 | |
| Match d’échecs Kasparov-Deep Blue : quand l’IA a supplanté l’homme
Double champion de France d’échecs, Laurent Fressinet revient sur le choc entre Garry Kasparov et Deep Blue en 1997,
qui fait l’objet d’une série, « Rematch », diffusée ce jeudi 17 octobre sur Arte.
mai 1997. Onde de choc mondiale dans le milieu des échecs, d'ordinaire si discret. Garry Kasparov, champion du monde de la discipline depuis 1985, date à laquelle il était devenu le plus jeune joueur à obtenir ce titre à seulement 22 ans, est battu par une machine développée par IBM, Deep Blue. Ce duel mythique, qui marque à la fois un tournant historique dans le monde des échecs et une étape clé dans le milieu, encore balbutiant, de l'intelligence artificielle, est raconté dans la minisérie Rematch, dont les trois premiers des six épisodes sont diffusés ce jeudi 17 octobre à 20 h 55 sur Arte.
Réalisée sous la forme de « thriller mental », cette série a mis six longues années à voir le jour pour « réussir à reproduire avec exigence une tension psychologique universelle », explique au Point Bruno Nahon, son producteur : « Que vous soyez intéressé ou pas par les échecs, l'IA ou l'avancée des sciences, ça va vous captiver parce que vous voulez savoir qui va gagner, mais surtout comment une entité va gagner ou un personnage va perdre. »
Si l'on dévore la série, c'est parce qu'elle aborde un sujet qui a fait s'arracher les cheveux de nombreux joueurs d'échecs et a fait vibrer les ingénieurs informatiques de l'époque. Et, surtout, parce qu'elle marque le début des affrontements entre l'humain et la machine. Laurent Fressinet, double champion de France d'échecs et entraîneur du numéro un mondial Magnus Carlsen pendant dix ans, revient sur ce moment historique et le bouleversement, toujours d'actualité, qu'a initié ce match il y a vingt-sept ans.
Le Point : Avez-vous un souvenir de ce match historique entre Garry Kasparov et Deep Blue en 1997 ?
Laurent Fressinet : Je n'y étais pas, j'étais adolescent, mais je l'ai évidemment suivi. C'était très compliqué de trouver un moyen de le voir parce qu'il n'y avait pas Internet, donc il fallait vraiment le vouloir pour pouvoir regarder le match. C'était une autre époque [rires] !
Dans la série Rematch, Garry Kasparov se demande : « Si l'intelligence artificielle triomphe, que vont devenir les échecs ? Que vais-je devenir ? » En quoi l'affrontement entre Kasparov et Deep Blue a-t-il marqué un tournant dans l'histoire des échecs ?
Cette génération pensait que les humains, en particulier les Russes, étaient le symbole de l'intelligence et qu'on ne serait jamais battu par la force brute d'un ordinateur. On pensait tous que Kasparov allait gagner. Je crois qu'à partir de là, on a compris que ça allait changer. La seule question, c'était « quand ? ». C'est à cette époque que j'ai eu mon premier ordinateur et que les joueurs ont commencé à affronter les ordinateurs, à travailler avec eux.
Assez rapidement après sa défaite, tout le monde a compris que ça ne servait à rien de lutter, que le combat était perdu d'avance. Quelques années plus tard, il était déjà clair que les matchs hommes contre ordinateurs n'avaient plus aucun intérêt sportif. Les machines étaient beaucoup plus fortes que les humains. C'était un premier grand tournant, la force brute avait dépassé le cerveau humain.
Est-ce que ça a initié un changement dans la façon de jouer aux échecs, mais aussi dans l'entraînement, dans la préparation des joueurs ?
Dans l'entraînement, oui. À partir de ce moment-là, l'ordinateur est devenu omniprésent, on s'est toujours appuyé sur lui pour vérifier ce qu'on pensait, pour nos analyses d'après-match, même pour nos préparations de début de partie, puisqu'on prépare très souvent à l'avance les dix ou quinze premiers coups, comme les séquences de services et coups droits au tennis par exemple. C'était devenu inévitable de se servir de l'ordinateur parce qu'on savait que les autres le faisaient, et donc on ne pouvait pas partir avec un tel désavantage. En revanche, on n'a pas vraiment changé notre façon de jouer aux échecs, parce qu'on ne pouvait pas reproduire ce que faisait l'ordinateur.
Face à un Deep Blue capable de calculer 200 millions de positions par seconde, quel atout l'homme doit-il mettre en avant pour avoir une chance contre la machine ?
L'intuition humaine. Kasparov ne va pas tout calculer, il va s'arrêter après avoir calculé une séquence de trois ou quatre coups et, avec ce qu'il a vu et tout ce qu'il a acquis en connaissances, il va évaluer les positions et penser pour développer sa stratégie. La machine, pendant ce temps, ne fait que calculer, sans aucune intuition basée sur ses connaissances.
La plus grosse révolution, selon moi, intervient plutôt en 2017, quand l’IA s’en est vraiment mêlée, grâce au travail de Demis Hassabis, qui s’est récemment vu attribuer le prix Nobel. Est-ce qu'au moment de ce match, vous trouviez cela effrayant ?
Effrayant, certainement pas, mais excitant, c'est certain ! Kasparov était le champion incontesté depuis très longtemps et le héros de ma jeunesse puisque, quand j'ai commencé à jouer, il était champion du monde et écrasait tous ses adversaires. Donc on ne savait pas du tout à quoi s'attendre avec cet ordinateur et c'était fascinant de voir s'il pouvait gagner.
On le voit bien dans la série, même ce super-ordinateur, très puissant, a besoin de s'entourer de très grands joueurs d'échecs pour s'entraîner et espérer battre Kasparov. C'est donc peut-être dans la collaboration IA/humain que se trouve l'évolution des échecs ?
Oui. C'est pour ça que la plus grosse révolution, selon moi, intervient plutôt en 2017, quand l'IA s'en est vraiment mêlée, grâce au travail de Demis Hassabis, qui s'est récemment vu attribuer le prix Nobel de chimie pour son modèle d'IA qui fait de la prédiction de la structure des protéines. Sur son ordinateur AlphaZero, il a seulement intégré les règles du jeu, et la machine a appris seule pendant quatre heures, et a fini par massacrer Stockfish 8, qui était alors le champion du monde des ordinateurs aux échecs, beaucoup plus fort que le Deep Blue de l'époque. Pour Deep Blue, des ingénieurs entraient des lignes de code pour intégrer des ouvertures, ils aidaient la machine, qui ne progressait jamais par elle-même, tandis qu'AlphaZero apprend et progresse à chaque partie ! C'est quelque chose d'encore plus impressionnant. Deep Blue est apparue au début des ordinateurs, c'était la première marche vers AlphaZero.
Que dit cette nouvelle révolution de 2017 de l'évolution et du futur du monde des échecs ?
AlphaZero a appris beaucoup de choses aux joueurs professionnels. C'était très intéressant de voir ce qu'il faisait, même si, parfois, on ne comprenait rien et ça nous dépassait complètement. Par rapport à Deep Blue, ça nous a beaucoup plus appris sur le fond pour le haut niveau. Ça nous a fait découvrir de nouvelles stratégies, en a remis d'autres en question, a démonté certaines vérités, certains principes qui semblaient acquis à travers les siècles, comme celui de ne pas pousser les pions sur l'aile parce qu'il faut occuper le centre.
Pour les amateurs, l'IA a apporté quelque chose de génial : maintenant, quand vous jouez une partie sur Internet, à la fin l'IA vous fait un bilan, vous présente vos erreurs. C'est devenu beaucoup plus fun de jouer parce que les gens ont un retour et des conseils du meilleur joueur du monde, l'ordinateur. C'est beaucoup plus ludique. Ça a dopé la pratique en ligne et donc, forcément, la pratique live par ricochet. C'est pour ça qu'il y a un boom mondial des échecs, aussi favorisé par la série Le Jeu de la dame, restée dix semaines numéro 1 sur Netflix, et par le confinement.
Pensez-vous qu'on pourrait être encore surpris par de nouvelles révolutions dans le milieu des échecs, après Deep Blue et AlphaZero ?
Les victoires et avancées d'AlphaZero et des IA actuelles sont tellement écrasantes que j'ai du mal à voir comment aller encore plus loin que de donner les règles du jeu à une machine et qu'elle apprenne toute seule en quatre heures puis gagne contre les plus forts aux échecs… Mais, comme l'histoire l'a montré, on peut toujours être surpris.https://www.lepoint.fr/science/rematch-retour-sur-le-duel-entre-kasparov-et-l-ia-qui-a-marque-un-tournant-dans-l-histoire-des-echecs-17-10-2024-2572965_25.php#11 __________________ ╔═╦╗╔╦╗╔═╦═╦╦╦╦╗╔═╗ ║╚╣║║║╚╣╚╣╔╣╔╣║╚╣═╣ ╠╗║╚╝║║╠╗║╚╣║║║║║═╣ ╚═╩══╩═╩═╩═╩╝╚╩═╩═╝◘cbcc95.forumactif.org |
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